Comment animer un blog dédié au Sénégal sans évoquer la figure tutélaire, emblématique du pays que fut Léopold Sédar Senghor, premier Président de la république en 1960 ? Il appartient en effet à cette génération d'hommes d'Etat africains qui eurent à installer l'indépendance, à l'image d'un Houphouët-Boigny en Côte d'Ivoire par exemple. Mais le parcours de Senghor lui donne bien d'autres dimensions, notamment littéraires.
Senghor est né le 9 octobre 1906 à Joal, à une vingtaine de kilomètres au sud de Keur Camape. Son père commerçant aisé, bien que catholique, eut 4 épouses dont la troisième, Gnilane Ndiémé Bakhoum, mit au monde Senghor. Le petit Léopold fut ainsi élevé au sein d'une fratrie qui ne comptait pas moins de 25 enfants au total. De sa mère sérère, Senghor recevra son prénom Sédar qui signifie en sérère "qu'on ne peut humilier".
Le parcours scolaire de Senghor est édifiant : passé les premières années aux côtés de sa mère, l'enfant rejoint son père à Joal où il fréquente la maison catholique : c'est là qu'il apprendra ses premiers mots de français avant d'achever son cycle initial d'études à Dakar où il obtient brillamment le baccalauréat. Grâce à une bourse de l'administration coloniale, il quitte pour la première fois le Sénégal en 1928 pour débuter ce qu'il appellera ensuite ses "seize années d'errance". Avec l'aide du député Blaise Diagne, il entre en prépa au Lycée Louis-le-Grand à Paris où il côtoiera notamment Georges Pompidou. En 1931, il obtient une licence de lettres et est le premier africain à réussir en 1935 le concours de l'agrégation de grammaire, lui ouvrant une carrière d'enseignant.
C'est aussi durant cette période qu'il rencontrera l'antillais Aimé Césaire et le guyanais Léon-Gontran Damas avec qui il fondera la thèse de la "négritude" que Césaire définissait ainsi : "La Négritude est la simple reconnaissance du fait d'être noir, et l'acceptation de ce fait, de notre destin de noir, de notre histoire et de notre culture".
Mais la guerre arrive et en 1939, Léopold Sédar Senghor est enrôlé comme fantassin dans un régiment d'infanterie coloniale. Fait prisonnier en juin 1940, il sera finalement libéré deux ans plus tard en raison de son état de santé. Libéré, il participe à la résistance et reprend ses activités d'enseignant qu'il conservera jusqu'à l'indépendance du Sénégal en 1960. Le 21 octobre 1945, il est élu député du Sénégal-Mauritanie au sein de la première assemblée nationale constituante française. Il siègera ensuite à l'Assemblée sans discontinuer jusqu'au 15 juillet 1959 d'abord sous l'étiquette socialiste puis comme indépendant. Il sera élu Maire de Thiès (Sénégal) en 1956 tout en siégeant par intermittence au gouvernement français.
En janvier 1959, il constitue avec son homologue malien Modibo Keïta l'éphémère fédération du Mali (Sénégal, Mali, actuel Bénin et actuel Burkina-Faso) jusqu'à ce que chacun de ces pays devenus indépendants s'érige en Etat autonome. Le 5 septembre 1960, Senghor est élu président de la toute nouvelle République du Sénégal ; il sera l'auteur du Lion rouge, l'hymne officiel sénégalais toujours en vigueur à ce jour. Sa présidence qui a connu des périodes troublées durera jusqu'en décembre 1980, date à laquelle il démissionnera au profit d'Abdou Diouf son premier Ministre.
Parallèlement à ce parcours public, Leopold Sédar Senghor construit un parcours littéraire de poète réputé. En 1935, il publie son premier recueil de poésie intitulé "Chants d'ombre", qui a été salué comme un chef-d'œuvre de la poésie africaine. Ses poèmes expriment souvent un profond amour pour l'Afrique et ses traditions, ainsi qu'une réflexion sur la condition de l'homme noir dans un monde dominé par la colonisation et le racisme.
Après sa retraite politique, Senghor a continué à écrire et à enseigner. Il a été membre de l'Académie française et a occupé des postes universitaires en France et aux États-Unis. Léopold Sédar Senghor est décédé le 20 décembre 2001 dans sa maison de Verson en Normandie mais son héritage en tant qu'écrivain, poète et homme politique africain reste très important.
PS : pour ceux qui veulent en savoir davantage sur la vie et l'œuvre de Léopold Sédar Senghor, je ne saurais trop conseiller de lire ici l'éloge que prononça Valéry Giscard d'Estaing sur son prédécesseur sénégalais à l'Académie française.
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